Dans un courrier daté du 17 avril adressé au ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin et dont l’AFP a pris connaissance, la contrôleure Dominique Simonnot brocarde un « recours massif » à des interpellations et gardes à vue « préventives ».
Dans sa réponse datée du 2 mai, consultée par l’AFP, M. Darmanin fait valoir que la contrôleure « excède ses compétences, notamment lorsqu’elle dénonce +une instrumentalisation des mesures de garde à vue à des fins répressives ».
La France connaît depuis mi-janvier des manifestations contre la réforme des retraites, qui ont été ces derniers temps souvent marquées par des violences.
Lors des manifestations du 1er-Mai, 540 personnes ont été interpellées dans le pays, et 406 policiers et gendarmes blessés, selon le ministre de l’Intérieur.
Depuis le début de la contestation, associations, partis politiques, magistrats et avocats ont dénoncé des « interpellations préventives » lors des manifestations.
A plusieurs reprises, le préfet de police de Paris Laurent Nuñez s’est inscrit en faux contre ces accusations: « les interpellations préventives, ça n’existe pas ».
« Les 24 et 25 mars, trois équipes de contrôleurs ont visité neuf commissariats parisiens pour contrôler les conditions de prises en charge des personnes interpellées », a expliqué Mme Simonnot.
La conclusion de ces contrôles est accablante, Mme Simonnot faisant état « d’atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes enfermées ». D’une part « en raison des conditions matérielles de prise en charge dans certains locaux » et d’autre part du fait « du nombre important de procédures conduites en méconnaissance des normes et principes qui régissent la procédure de garde à vue, voire, dans certaines situations, en violation des textes ».
Elle dénonce ainsi des « irrégularités dans les documents relatifs à l’interpellation et l’indigence des éléments permettant de caractériser l’infraction ou la tentative d’infraction en cause ».
La contrôleure note en outre qu’alors que « 80% des procédures sont classées sans suite une fois opéré le contrôle de l’autorité judiciaire, la minorité des personnes déférées (…) quitte le tribunal libre ».
Le ministre conteste le raisonnement de Mme Simonnot en faisant valoir que la recherche de preuves pour établir la responsabilité individuelle lors de « scènes collectives de violence » est « souvent entravée par les mis en cause rompus aux techniques d’enquête ».
Pour lui, le fait que l’autorité judiciaire considère ensuite les infractions « comme insuffisamment caractérisées » ne signifie « nullement une absence d’infraction initiale ».