Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a adressé un message aux forces de l’ordre pour souligner « le caractère sensible que revêt cette rentrée » pour les “atteintes à la laïcité” en milieu scolaire. C’est tout l’exécutif qui, au nom de la défense de la laïcité, a appelé à « faire bloc » autour de cette interdiction.
La secrétaire générale du syndicat CGT, Sophie Binet, a toutefois jugé « très dangereux de faire la rentrée scolaire sur cette annonce-là ». Cela « occulte les vraies questions » et « stigmatise une partie de la population », a-t-elle estimé sur la chaîne publique France 2.
Cacher les « problématiques du terrain »
De nombreux enseignants jugent que la question de l’abaya « ne doit pas cacher les problématiques réelles du terrain ».
La rentrée se déroule en effet à nouveau sous tension en raison d’une crise du recrutement des enseignants – un phénomène pas nouveau mais qui s’est accentué depuis l’an dernier – avec cette année plus de 3.100 postes non pourvus aux concours d’enseignants dans le pays.
Emmanuel Macron a réaffirmé vendredi que la promesse d' »un professeur devant chaque classe » à la rentrée serait « tenue ».
Selon un sondage du syndicat d’enseignants SE-Unsa, mené auprès de 2.000 personnes, 68% des enseignants interrogés disent pourtant craindre qu’il y ait un manque de personnels pour la rentrée.
Pour résoudre la crise des vocations, l’exécutif met en avant sa politique de revalorisation « historique » mais, en dépit de l’effort budgétaire consenti, les syndicats ont accueilli avec beaucoup de réserve ces mesures. Et ils sont franchement hostiles à la mise en place du « pacte » qui prévoit de nouvelles hausses de rémunérations en contrepartie de nouvelles tâches, notamment pour effectuer des remplacements de courte durée.
Il existe en effet d’autres problématiques concernant l’école comme le harcèlement scolaire. Selon l’Ifop, 59% des 15-17 ans ont été victimes d’au moins une forme de harcèlement en 2021.
Quant à la pratique du métier, elle est aussi une source d’inquiétude : les syndicats pointent les faibles salaires et des conditions de travail qui se dégradent de plus en plus.
L’accueil des enfants en situation de handicap intellectuel est aussi fortement critiqué. Selon l’Unapei, l’un des principaux réseaux d’associations s’intéressant à ce sujet, 23 % n’ont “aucune heure de scolarisation” par semaine.
Pour la FCPE, principale fédération de parents d’élèves, le sujet de l’abaya ne doit « pas occulter les questions liées au manque de personnels » de direction ou d’infirmières « ou la priorité à donner à la lutte contre le harcèlement, aux effectifs surchargés des classes, à la lutte contre le décrochage scolaire, aux milliers d’enfants sans toit ».