AA / Ankara / Alex Sinhan Bogmis
Né en 1955 à Bobo Dioulasso, au Burkina Faso, de parents sénégalais, Cheikh Lô est un artiste dont la carrière musicale est profondément influencée par la diversité culturelle et un talent musical exceptionnel. Sa musique transcende les frontières et les genres, fusionnant habilement diverses traditions musicales pour créer un style tout particulier.
Devant la presse ce vendredi à la Maison de l’Afrique d’Ankara, la capitale de la Türkiye, en prélude au concert qu’il a donné dans le cadre du Festival de la Route de la Culture, organisé par le ministère de la Culture et du Tourisme de la Türkiye, Cheikh Lô a prôné une plus large ouverture dans les rapports humains à travers la musique.
Membre de la confrérie musulmane Baye Fall, sa carrière musicale est marquée par une diversité impressionnante. Il fusionne les rythmes du mbalax sénégalais avec la rumba du Congo et les influences musicales cubaines. Cette diversité musicale témoigne de son parcours cosmopolite et de sa capacité à intégrer différentes influences pour créer une musique captivante.
« J’ai démarré ma carrière à l’âge de 20 ans au Burkina Faso [anciennement Haute Volta], explique-t-il.
Mon inspiration est liée à mon école, où je jouais à Bobo Dioulasso. Nous faisions de la musique africaine variée. À l’époque, la musique cubaine était très présente en Afrique, particulièrement en Afrique de l’ouest. Il y avait aussi de la Rumba congolaise, de la Bembeya guinéenne. Nous avons commencé avec la musique cubaine. Cela a influencé notre rythme, ce qui a rendu ma musique relativement ouverte en raison des différents styles que je maitrise. »
Musicien autodidacte, il fait ses débuts à la fin des années 1990. Depuis lors, il a parcouru les scènes internationales, chantant en wolof, anglais et français, et collaborant avec des artistes de renom tels qu’Oumou Sangaré, Flavia Coelho, Papa Wemba, Youssou Ndour, entre autres.
« Lorsque j’ai commencé à Bobo Dioulasso, j’étais le plus jeune des musiciens. Comme j’apprenais, on me payait le demi-tarif. Le chef d’orchestre était très content de moi après deux ans parce que j’étais multi-instrumentiste et très jeune. Il me dit alors un jour : ‘à partir d’aujourd’hui, tu as les mêmes droits que tout le monde’ », se remémore-t-il avec sourire.
Après une période passée en France, où il a eu l’opportunité de côtoyer des musiciens renommés, son retour au Sénégal a marqué le début de sa carrière en solo, avec le soutien de Youssou Ndour, qui a produit son premier album, « Ne la Thiass », en 1996, rapidement devenu un classique de la musique africaine.
En dépit de son succès, Cheikh Lô reste certes attaché à ses racines, entre le Burkina Faso, son pays de naissance, et le Sénégal, le pays de ses parents, mais toujours ouvert au monde.
« Il est important d’interpeller la jeunesse, notamment celle de mon pays, pour qu’elle s’ouvre davantage. Qu’elle essaie d’écouter les musiques du monde, en tirer quelque chose qui pourrait être utile à leur style. Ne pas rester cantonnées dans la musique sénégalaise. Il faut promouvoir l’ouverture », soutient-il.
L’artiste sénégalais se retrouve en Türkiye pour la deuxième, après un séjour il y a quelques années dans la métropole Istanbul.
« J’ai une très bonne impression de la Türkiye. Je sais qu’il existe déjà un partenariat entre la Türkiye et le Sénégal, mon pays. La coopération comprend des aspects intéressants, surtout sur le plan humain. Il y a un élan positif, explique Cheik Lô.
Les échanges culturels sont très importants dans la vie. La culture est un champ très vaste qui comprend entre autres la littérature, la danse, la musique, l’artisanat, la gastronomie. Ça permet aux personnes de découvrir ce qu’elles ne connaissent pas. Ma venue en Türkiye cette année participe aussi au développement de la coopération turco-sénégalaise. »
À l’âge de 68 ans, Cheikh Lô est l’un des doyens de la musique sénégalaise, et son influence, son héritage dans le monde de la musique africaine sont indéniables. Sa musique continue de transcender le temps et l’espace, offrant une expérience musicale unique qui célèbre la diversité et la richesse de l’Afrique.
L’auteur des titres à succès tels que ‘degg gui’, ‘ndogal’ ou encore ‘set’ célèbrera en 2025 ses cinquante ans de sa carrière, dont les prémices remontent à Bobo Dioulasso.
« Je suis déjà à 48 ans de carrière. Je vais célébrer mes 50 années de carrière en 2025 en même temps que mes 70 ans de vie. J’ai un nouvel album en préparation. Le projet sera dévoilé au public d’ici le début de l’année 2024. Mon dernier album est sorti il y a 8 ans, en 2015, et a remporté le prix Womex des musiques du monde, une première pour un artiste africain », se réjouit Cheikh Lô.
Ce vendredi, l’artiste sénégalais se produira dans la salle de concert de l’orchestre symphonique de la Présidence turque (CSO ADA) à Ankara, dans le cadre du Festival de la Route de la Culture organisé par le ministère turc de la Culture et du Tourisme.
« Il faudra dépenser beaucoup d’énergie et élargir le répertoire pour satisfaire tous les publics », promet-il.
En marge du Festival de la Capitale de la Route de la Culture, de nombreuses activités sont simultanément organisées dans plusieurs grandes villes de la Türkiye en vue de présenter le patrimoine culturel, architectural et historique du pays au public local et international. Les précédentes éditions ont accueilli de grandes figures internationales, notamment le chanteur et musicien malien de renommée internationale, Salif Keita, ou encore « l’enfant chéri de Médina » Youssou Ndour.