Après le 7 octobre, des milliers de réservistes de l’armée israélienne sont mobilisés, envoyés en première ligne pour faire la guerre aux Palestiniens à Gaza.
Les actes de barbarie que perpètrent ces soldats israéliens sont d’une telle ampleur, qu’aujourd’hui elles causent des traumatismes psychologiques, allant jusqu’au suicide.
Certains d’entre eux, ou leurs familles, se sont exprimés au micro de CNN pour relater leur expérience macabre de la guerre.
Suicide
Eliran Mizrahi, père de quatre enfants, est l’un de ces soldats. Âgé de 40 ans, il est envoyé à Gaza le 8 octobre 2023, moins de 24 heures après l’attaque du Hamas.
Ce civil, jusque-là directeur dans une entreprise de construction, devient conducteur de bulldozer dans l’armée, témoin direct des horreurs de la guerre.
Après 186 jours sur le terrain, et blessé à plusieurs reprises, Mizrahi est diagnostiqué avec un syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Mais malgré une thérapie hebdomadaire, il est submergé par son mal-être. En juillet 2024, il se suicide.
Sa mère, Jenny Mizrahi, a témoigné de la transformation de son fils après son retour de Gaza.
“Il est sorti de Gaza, mais Gaza ne l’a pas quittée”, explique-t-elle, évoquant la souffrance silencieuse qui l’a habité jusqu’à la fin.
À son retour de Gaza, Mizrahi disait souvent à sa famille qu’il ressentait du ”sang invisible” s’écouler de son corps, a confié sa mère.
Shir, sa sœur, blâme l’armée israélienne pour la mort de son frère.
“À cause de l’armée, à cause de cette guerre, mon frère n’est plus là. Peut-être qu’il n’est pas mort d’une balle au combat, mais il est mort d’une balle invisible”, s’est-elle indignée.
Eliran Mizrahi n’est pas un cas isolé. De nombreux soldats israéliens reviennent de la guerre marqués par les scènes de violence et de destruction, incapables de trouver la paix.
Le journal israélien Haaretz a rapporté que, selon des données militaires obtenues par le journal, 10 soldats se sont suicidés entre le 7 octobre et le 11 mai.
“Ecraser, morts ou vivants”
Bien que l’armée israélienne affirme offrir des soins psychologiques à ses soldats, il reste difficile de mesurer l’ampleur du traumatisme.
Le soldat Guy Zaken, ami et co-pilote de Mizrahi à Gaza, a expliqué devant la Knesset en juin 2024 que les soldats ont dû, à de nombreuses reprises, “écraser” des Palestiniens, “morts ou vivants”.
Il avoue ne plus pouvoir manger de viande, les scènes macabres de la guerre se superposant à ses repas.
“Quand vous voyez beaucoup de chair à l’extérieur, et du sang… le nôtre et le leur, ça vous affecte vraiment quand vous mangez”, a-t-il confié à CNN, en évoquant les corps comme de la “chair”.
La barbarie de l’armée israélienne a imposé un traumatisme psychologique immense, exacerbé par le manque de soutien adéquat à leur retour.
Zaken affirme que de nombreux soldats, comme lui, sont piégés dans une spirale de stress post-traumatique, incapables de trouver du réconfort dans une société où la guerre et la violence font partie du quotidien.
Pas envie de retourner au front
L’offensive israélienne à Gaza depuis le 7 octobre, déjà la plus longue qu’Israël ait connue, continue de s’étendre, notamment avec les dernières tensions au Liban.
Cette situation plonge les soldats dans une crainte permanente d’être rappelés.
“Beaucoup d’entre nous ne font pas confiance au gouvernement ”, confie un médecin militaire sous couvert d’anonymat. Pour ces soldats, retourner au front signifie revivre un cauchemar dont ils ne se sont jamais vraiment échappés.
En Israël, le débat sur les répercussions mentales de cette guerre est presque inexistant, en partie en raison de la stigmatisation liée aux troubles psychologiques.
Pourtant, la demande de soins psychologiques augmente. Lors des funérailles de Mizrahi, ses camarades ont demandé un accès plus rapide à ces soins, arguant que de nombreux soldats souffrent en silence.
Si les soldats israéliens paient un lourd tribut psychologique, ce n’est rien à côté de la situation des civils palestiniens à Gaza, qui est beaucoup plus dramatique.
Soumis à des massacres quotidiens, les habitants de Gaza, ceux qui arrivent à survivre du moins, souffrent également de troubles psychologiques intenses au quotidien.
L’ONU a souligné dans un rapport que les Gazaouis ne connaissent même pas la notion de “post-trauma”, car pour eux, le traumatisme est continu et inévitable.
Pour les soldats israéliens comme Eliran Mizrahi, la guerre ne s’est pas arrêtée le jour où ils ont quitté Gaza. Elle se poursuit dans leur esprit, rongeant peu à peu leur santé mentale, jusqu’à l’irréparable.