Après des propos jugés controversés tenus durant son voyage en Chine la semaine dernière, le président français Emmanuel Macron entame mardi une visite d’Etat de deux jours aux Pays-Bas où il doit prononcer un discours très attendu sur l’Europe.
Sept ministres (Affaires étrangères, Europe, Armées, Intérieur, Transition énergétique, Transports, Industrie et Recherche) accompagnent le président français, ainsi que son épouse.
De même qu’en Chine la semaine dernière, la crise des retraites sera omniprésente à l’arrière-plan de la visite alors qu’une nouvelle journée de mobilisation s’annonce jeudi en France, à la veille d’un avis crucial du Conseil constitutionnel sur le texte et l’avenir de la réforme.
Cette visite d’Etat, la première d’un président français aux Pays-Bas depuis 2000, succède à celle effectuée par le couple royal en France en 2016. Elle se veut une concrétisation du rapprochement entre les deux pays depuis la décision en 2016 du Royaume-Uni de quitter l’UE, qui a rebattu les cartes des alliances au sein de l’Union.
Macron doit présenter sa vision » de la souveraineté et de la « sécurité »
Les Pays-Bas ont alors « perdu un allié traditionnel sur la scène européenne, ce qui les a conduits à diversifier leurs coopérations », relève l’Elysée. De son côté, Emmanuel Macron a renforcé les liens avec d’autres capitales, notamment Rome et Madrid, au-delà de l’axe traditionnel Paris-Berlin.
Il entretient également des relations personnelles cordiales avec le Premier ministre neérlandais Mark Rutte, issu comme lui du monde des affaires.
A peine revenu de Pékin, Emmanuel Macron est très attendu sur les sujets d’autonomie stratégique après avoir appelé l’UE à ne pas être « à la traîne » des Etats-Unis et de la Chine sur la question de Taïwan et à incarner un « troisième pôle ».
Le chef de l’Etat doit « présenter sa vision » de la souveraineté et de la « sécurité » européennes en matière économique et industrielle dans un discours mardi après-midi à l’Institut néerlandais Nexus à La Haye.
Emmanuel Macron incite à engager un plan d’investissements massifs dans l’industrie verte en Europe afin de répondre à celui lancé par Joe Biden.
« Nous ne voulons pas dépendre des autres sur les sujets critiques », a-t-il également insisté dimanche dans le quotidien français « Les Echos », citant l’énergie, l’intelligence artificielle ou les réseaux sociaux.
« Mort cérébrale »
Son appel, dans la même interview, à garder ses distances sur la question de Taïwan et à « moins dépendre des Américains » en matière de défense a aussitôt suscité critiques et interrogations, comme ses propos précédents sur l’Ukraine.
« Macron fait des Etats-Unis les seuls responsables des tensions et non la Chine dont l’objectif est pourtant de prendre le contrôle de Taïwan, de changer le statu quo », a tweeté Antoine Bondaz, expert à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) à Paris.
« Une mort cérébrale s’est produite quelque part, pas de doute », a ironisé le directeur de l’Institut polonais de relations internationales (PISM), M. Slawomir Debski, en référence à la formule utilisée par le président français à propos de l’Otan.
Les Européens de l’Est, longtemps soumis aux diktats de Moscou, restent très attachés à l’Otan et à la protection américaine et considèrent avec suspicion la défense européenne prônée par la France, même si Paris insiste sur le fait que celle-ci est complémentaire et non concurrente de l’Alliance.
Dans la foulée du discours, Paris et La Haye signeront mercredi un « pacte pour l’innovation et la croissance durables », avec à la clé des coopérations dans les semi-conducteurs, la physique quantique et l’énergie.
Le président Macron visitera à cette occasion les laboratoires de physique quantique de l’université d’Amsterdam. Le couple présidentiel, accompagné du roi et de la reine des Pays-Bas, se rendra aussi à l’exposition Vermeer au Rijksmuseum d’Amsterdam avant de rentrer mercredi soir à Paris.