L’Organisation mondiale de la santé, qui dès mardi avait alerté « du risque biologique énorme », est « préoccupée par l’occupation du laboratoire central de santé publique par l’une des parties au conflit », a déclaré le directeur général de cette agence spécialisée onusienne, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors d’une conférence de presse à Genève.
« Les techniciens n’ont plus accès au laboratoire, ce qui signifie que le laboratoire n’est plus en mesure de remplir sa fonction normale de diagnostic et de référence. Nous craignons également que les personnes qui occupent le laboratoire ne soient accidentellement exposées aux agents pathogènes qui y sont stockés », a-t-il dit.
L’OMS cherche à obtenir davantage d’informations et « procède à une évaluation des risques », a indiqué le docteur Tedros.
A ses côtés, le Dr. Michael Ryan, chargé du Programme OMS de gestion des situations d’urgence sanitaire, a précisé que « l’équipe sur le terrain, ainsi que nos équipes chargées des risques biologiques et de la biosécurité, procèdent » à cette « évaluation approfondie des risques ».
« Conséquences inimaginables »
Le Comité central des laboratoires médicaux du Soudan a confirmé mercredi que « le laboratoire national de santé et la Banque du sang ont été évacués et les stocks stratégiques de sang ont été transférés dans d’autres provinces ».
« Leur ciblage pourrait conduire à une catastrophe sanitaire et environnementale aux conséquences inimaginables », a indiqué le comité dans un communiqué.
Ni l’OMS, ni le Comité central des laboratoires n’ont précisé qui de l’armée du général Abdell Fattah al-Burhane ou des paramilitaires du général Mohamed Hamdane Daglo occupe le laboratoire.
Selon l’OMS, ce laboratoire contenait des échantillons des agents pathogènes de la rougeole, du choléra et de la poliomyélite.
Le Dr Olivier le Poulain, un des responsables de la réponse de l’OMS à la crise soudanaise, a expliqué mercredi aux journalistes qu’il y avait également des échantillons du SARS-CoV-2 (le virus responsable du Covid-19) et de la tuberculose, en particulier de la tuberculose multirésistante.
Epidémies
La prise de ce laboratoire n’est pas le seul risque sanitaire auquel le Soudan fait face actuellement.
« A l’heure actuelle, le principal danger pour la santé et le bien-être de la population soudanaise est le manque d’accès à l’eau potable et à la nourriture, et le risque d’être blessé par des armes, des chars et d’autres armes qui sont utilisées sans discernement dans les zones civiles », a observé le Dr Ryan.
A Khartoum, a relevé le Dr Tedros, 61% des établissements de santé sont fermés et seuls 16% fonctionnent normalement.
« De nombreux patients atteints de maladies chroniques, telles que les maladies rénales, le diabète et le cancer, n’ont pas accès aux établissements de santé ou aux médicaments dont ils ont besoin », a-t-il dit.
Les combats meurtriers au Soudan ont déjà fait des centaines de morts.
Le Dr Tedros a souligné que l’OMS s’attend à ce qu’il y ait – en plus des personnes tuées durant les affrontements – « beaucoup d’autres morts causées par des épidémies, le manque d’accès à la nourriture et à l’eau, les perturbations des services de santé, y compris de vaccination ».
L’OMS dispose de stocks de médicaments essentiels, de poches de sang et de matériel chirurgical, mais l’organisation indique avoir besoin de meilleures conditions de sécurité pour pouvoir les acheminer.