Cuba est confrontée à sa pire crise en trente ans. Pour ses quelque 10 millions d’habitants, l’arrivée de l’ouragan Oscar, couplée à la panne géante d’électricité en cours depuis vendredi –qui fait suite à des pannes chroniques — s’ajoute à des pénuries de nourriture, de médicaments et à une inflation galopante.
Les autorités de l’est de l’île « travaillent déjà d’arrache-pied pour protéger la population et les ressources économiques, compte tenu de l’imminence de l’ouragan Oscar », a assuré le président Miguel Díaz-Canel dans un message publié samedi soir sur le réseau social X.
Accompagné de vents de 139 km/h, Oscar devrait atteindre dans la journée de dimanche l’est de Cuba où de fortes pluies sont attendues, selon le Centre national des ouragans (NHC) américain.
Dans un autre message sur X, la présidence cubaine a fait état d’un début de progrès dans le rétablissement du système électrique.
« 16% des consommateurs ont déjà de l’électricité et environ 500 mégawatts sont en train d’être générés. Le système continuera à augmenter sa charge dans les prochaines heures », a-t-elle affirmé.
A titre de comparaison, le pays avait consommé 3 300 mégawatts, jeudi, à la veille de la panne totale d’électricité liée à l’arrêt de la principale centrale thermique de l’île, située à Matanzas (ouest).
« Trop de stress »
Jeudi, le président cubain avait annoncé que l’île se trouvait en situation « d’urgence énergétique » face aux difficultés pour acheter le combustible nécessaire à l’alimentation de ses centrales, à cause du renforcement de l’embargo que Washington impose à l’île depuis 1962.
Samedi soir, la plupart des quartiers de La Havane se trouvaient dans le noir, à l’exception des hôtels et des hôpitaux équipés de générateurs d’urgence et des quelques rares maisons privées qui disposent de ce type d’équipement.
« La situation est très difficile, mais j’essaie de rester calme, car il y a déjà trop de stress dans ce pays », a confié à l’AFP Yaima Valladares, une danseuse de 28 ans.
Isabel Rodriguez, 72 ans, confie, samedi soir, avoir du mal comme beaucoup de ses compatriotes à dormir, faute de pouvoir utiliser des ventilateurs alors qu’il fait 27 degrés, mais avec un taux d’humidité très élevé, soit un ressenti de 32 degrés.
Le président Díaz-Canel a tenu une réunion de supervision vendredi soir, au cours de laquelle il a promis qu’il n’y aurait pas de repos pour les services de l’Etat tant que l’électricité ne serait pas rétablie dans son intégralité sur l’île.
« Les gens sont un peu énervés parce que le courant est coupé depuis longtemps et Dieu sait quand il sera rétabli », souligne Rafael Carrillo,mécanicien de 41 ans, qui dit avoir marché pendant près de cinq kilomètres en raison du manque de moyens de transport.
« On passe quatre ou cinq heures à attendre la guagua (bus) et quand elle passe, elle est pleine et ne s’arrête pas », dit-il avec lassitude.
« Plus d’internet »
« Sans électricité, il est presque impossible d’étudier », explique de son côté un jeune homme de 18 ans, sous couvert d’anonymat. « Mon téléphone n’a plus de batterie, nous n’avons plus d’internet, la connexion a également disparu et je ne peux pas appeler mes proches parce qu’il n’y a pas de couverture sur la ligne fixe à la maison ».
Depuis trois mois, les Cubains pâtissent de coupures de courant devenues de plus en plus fréquentes, avec un déficit énergétique national de 30%. Jeudi, ce déficit avait atteint 50%.
Ces dernières semaines, dans plusieurs provinces, les coupures ont duré plus de 20 heures par jour.
A Cuba, l’électricité est produite par huit centrales thermoélectriques vétustes, parfois en panne ou en cours de maintenance, ainsi que par plusieurs centrales flottantes –que le gouvernement loue à des entreprises turques– et des groupes électrogènes. La plupart de ces infrastructures ont besoin de carburant pour fonctionner.
Les pannes d’électricité ont été l’un des éléments déclencheurs des manifestations historiques du 11 juillet 2021.
En septembre 2022, l’île avait déjà connu un « blackout » généralisé après le passage de l’ouragan Ian qui avait frappé l’ouest de l’île. Le rétablissement complet de l’électricité avait pris plusieurs jours dans la capitale et plusieurs semaines sur l’ensemble de l’île.