Le 18 août dernier des snipers de l’armée israélienne ont ciblé le journaliste de TRT Arabi, Sami Barhoum, qui réalisait un reportage à Gaza. Ses jours ne sont plus en danger.
Deux cameramen de la chaîne qatari Al -Jazeera en reportage à Gaza, le 8 octobre dernier, n’ont pas eu la même chance. Ils ont été pris pour cibles par un bombardement et des tireurs embusqués de l’armée israélienne. Hospitalisés dans un état critique, ils sont entre la vie et la mort.
Ces attaques contre les journalistes couvrant Gaza sont loin d’être des cas isolés. Ils participent d’une stratégie savamment montée pour rendre invisible le génocide actuellement en cours à Gaza, dénonce l’organisation de défense des journalistes Reporters Sans frontières (RSF).
Plus de 170 journalistes tués en un an
Au 9 octobre 2024, 176 journalistes ont été tués à Gaza selon le décompte du bureau des médias des autorités palestiniennes à Gaza.
“Le massacre des journalistes à Gaza doit cesser. L’élimination par l’armée israélienne des journalistes de Gaza, plus de 130 en moins d’un an, risque d’imposer un black-out médiatique complet sur l’enclave verrouillée”, s’indignait, le 29 septembre dernier, le Directeur général de RSF, Thibaut Brittin.
“Ces attaques, soulignait-il, ne visent pas seulement la presse en Palestine, mais aussi le droit du public, partout dans le monde, à recevoir une information fiable –libre, indépendante et pluraliste– en provenance de l’une des zones de conflit les plus observées de la planète”.
Cette campagne de l’armée israélienne contre les journalistes couvrant Gaza avait commencé par le bombardement du 13 octobre 2023 dans le Sud-Liban. Un journaliste de Reuters avait été tué et six reporters, blessés dont deux de l’Agence France-Presse. Une enquête menée par l’AFP avait désigné l’armée israélienne comme responsable de ces agissements.
Les organisations de défense des journalistes décrivent Israël comme étant “l’une des plus grandes prison pour journalistes” du fait de la campagne militaire à Gaza. En novembre 2023, le syndicat des journalistes palestiniens dénombrait une quarantaine d’hommes des médias retenus dans les geôles israéliennes.
Dans cette campagne de musellement de la presse couvrant Gaza, Al-Jazeera a payé un lourd tribut. Outre l’interdiction et la fermeture de ses bureaux en Israël en mai 2023, pour des “raisons de sécurité”, les locaux de la chaîne qatarie ont été fermés à Ramallah pour une durée de 45 jours, le 22 septembre dernier.
Rédactions détruites
En sus des attaques contre les journalistes, les rédactions sont également dans le collimateur de l’armée israélienne. Le bureau de l’AFP à Gaza a été gravement endommagé, le 2 novembre 2023, par des tirs de char israélien, selon une enquête menée par l’AFP et plusieurs médias internationaux, publiée mardi.
Avant cela, l’immeuble de 13 étages abritant notamment les équipes de la chaîne d’information qatarie Al-Jazeera et de l’agence de presse américaine Associated Press (AP) avaient été pulvérisés par plusieurs missiles israéliens.
Aucune accréditation pour couvrir Gaza
Depuis le 7 octobre dernier, l’armée israélienne n’a délivré aucune accréditation pour couvrir Gaza. Les journalistes étrangers et même israéliens ne sont pas les bienvenus.
“En dehors des aspects de guerre et de tous les manques, le problème principal reste bien le fait qu’aucun journaliste étranger ne soit autorisé à se rendre sur place pour documenter cette guerre asymétrique”, se désole au micro de TRT Français Anthony Bellanger, Secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes .
Certains analystes déplorent aussi une couverture occidentale biaisée de la guerre qu’Israël impose aux Palestiniens à Gaza. “Le traitement médiatique du conflit est clairement biaisé. À chaque fois qu’un civil israélien est tué, cela fait la une des journaux. Mais quand des milliers de Palestiniens meurent sous les bombes, cela devient une simple statistique“, déplore Richard Wagman, président d’honneur de l’Union juive française pour la paix (UJFP).
Il critique cette manière de traiter l’information, expliquant que ce déséquilibre contribue à fausser la perception du conflit dans l’opinion publique internationale, en renforçant l’idée qu’Israël agit toujours en légitime défense, même dans des situations où il y a une asymétrie évidente dans l’usage de la force.